Panorama Du Devoir De Vigilance En France Et En Europe
Rétrospective 2024 et enjeux 2025
L'année 2024 a marqué un tournant majeur pour le devoir de vigilance, aussi bien en France (I.) qu'à l'échelle européenne (II.). Entre la création de chambres spécialisées au sein de la cour d’appel et du tribunal judiciaire de Paris, des décisions jurisprudentielles attendues et un nouveau cadre réglementaire européen faisant l’objet de vifs débats, la période actuelle constitue un moment clé dans l'évolution des obligations règlementaires auxquelles les entreprises seront soumises.
I. Un tournant décisif pour le devoir de vigilance en France
1. Contenu du devoir de vigilance
Pour rappel, le régime français du devoir de vigilance a été instauré par la loi du 27 mars 2017[1], loi pionnière en la matière. En réaction à la catastrophe du « Rana Plaza » du 24 avril 2013, l’objectif était de prévenir les atteintes graves envers les droits humains, l’environnement, les libertés fondamentales, la santé et la sécurité des personnes. Cette loi qui instaure ainsi une obligation de vigilance[2] des sociétés mères et des entreprises donneuses d’ordre à l’égard de leurs filiales, concerne en France aujourd’hui plus de 270 entreprises[3].
L’article L. 225-102-4 du code de commerce est applicable aux sociétés employant en leur sein ou dans leurs filiales directes ou indirectes, au moins 5 000 salariés lorsque leur siège social est situé en France, ou au moins 10 000 salariés lorsque leur siège social est situé à l’étranger.
Les sociétés répondant à ces critères sont tenues d’établir et de mettre en œuvre de manière effective un plan de vigilance, qui s’articule autour de cinq mesures clés (une cartographie des risques, des évaluations régulières des partenaires commerciaux, des actions pour prévenir ou atténuer les risques, un mécanisme d'alerte et un suivi de l’efficacité des mesures). Ce plan s’étend à l'ensemble des activités de la société mère, de ses filiales directes et indirectes, ainsi que des activités de ses sous-traitants et fournisseurs, dans le cadre de relations commerciales établies.
Dans les groupes de sociétés, les filiales soumises au devoir de vigilance sont réputées s’être acquittées de leurs obligations lorsque la société mère « établit et met en œuvre un plan de vigilance relatif à l'activité de la société et de l'ensemble des filiales ou sociétés qu'elle contrôle »[4].
Le respect de ces obligations est garanti par un double dispositif de sanctions. D’une part, un dispositif de mise en demeure par lequel l’entreprise peut être sommée de se conformer à ses obligations. D’autre part, faute pour la société de satisfaire à cette mise en demeure dans un délai de trois mois, sa responsabilité civile peut être engagée par toute personne justifiant d’un préjudice qui résulterait d’un manquement à ces obligations[5].
2. Spécialisation des juridictions
La France a choisi de judiciariser le devoir de vigilance. En 2021, le tribunal judiciaire de Paris s’est vu confier une compétence exclusive en la matière[6], puis, pour accompagner ce mouvement, deux chambres spécialisées ont été créées. C’est d’abord la cour d'appel de Paris qui a annoncé, le 15 janvier 2024, la création d'une chambre 5-12 dédiée aux « contentieux émergents » au sein de son pôle économique[7], dont la compétence s’étend d’ailleurs au-delà du devoir de vigilance stricto sensu. Puis, le 2 septembre 2024, le tribunal judiciaire de Paris lui a emboîté le pas avec la consécration d’une 34ème chambre civile, dédiée spécifiquement à l’ensemble des contentieux issus de la loi du 27 mars 2017, ainsi qu’à tous les contentieux assimilés aux matières sociale, économique et environnementale, aussi bien au fond qu’en référé.
La création de ces nouvelles chambres témoigne de la volonté des deux juridictions concernées de spécialiser sur la durée les magistrats qui seront en charge de ces contentieux.
3. Affaires marquantes en 2024
La fin de l’année 2023 avait été marquée par la décision rendue dans l’affaire La Poste, dans laquelle le tribunal judiciaire de Paris avait rendu sa première décision au fond sur l’application de la loi, en particulier sur le contenu de la cartographie des risques, l’évaluation des risques liés aux sous-traitants, le mécanisme d’alerte et le suivi des mesures de vigilance[8].
Le 18 juin 2024, trois autres arrêts importants ont été rendus par la cour d’appel de Paris[9]. Ces derniers ont enrichi le contentieux en la matière[10], bien que ne statuant pas sur le fond de ces affaires.
De ces trois arrêts, on doit plus particulièrement retenir que :
- La mise en demeure, préalable obligatoire à l’introduction de l’action aux fins d’injonction, doit être ferme dans son interpellation et précise dans son contenu. Les demandes qui sont formulées dans le cadre de l’action aux fins d’injonction peuvent toutefois évoluer après la mise en demeure, qui n’a pas à être réitérée lorsqu’un nouveau plan a été publié après celle-ci.
- Sur le terrain de la qualité à agir, si les associations ont été jugées recevables, la quasi-totalité des collectivités territoriales se sont vues déboutées par la cour. Selon cette dernière, elles ne démontraient pas un intérêt public local spécifique distinct des impacts globaux ; une condition particulièrement nécessaire en matière de préjudice écologique, comme l’a d’ailleurs souligné quelques semaines plus tard la CEDH[11] .
- Enfin, à la question de l’irrecevabilité pour défaut de qualité à défendre[12], la cour d’appel répond que la société-tête de groupe est bien la « débitrice naturelle et inconditionnelle » de l’obligation de publier et de mettre en œuvre un plan de vigilance. A noter qu’en cas de défaillance de cette dernière, il est fait obstacle à la présomption selon laquelle les filiales ou sociétés contrôlées qui dépassent les seuils prévus par la loi sont réputées satisfaire à leurs obligations légales et la filiale reste tenue de publier et mettre en œuvre un plan de vigilance.
II. Des évolutions significatives à l’échelle européenne et de nombreuses incertitudes
Tout d’abord, la CEDH s’est elle aussi emparée du sujet en rendant trois arrêts remarqués le 9 avril 2024 qui, s’ils ne se fondent pas directement sur le devoir de vigilance, portent en germe les bases de jurisprudences à venir et s’inscrivent dans un mouvement plus général d’écologisation des droits humains.
- Ainsi, dans un premier arrêt[13], la CEDH a condamné la Suisse à une amende de 80 000 € aux motifs que les États doivent prendre des mesures pour réduire leurs niveaux d’émission de Gaz à Effet de Serre (GES) afin d’atteindre la neutralité carbone au cours des trois prochaines décennies, notamment en mettant en place des objectifs et calendriers pertinents. Les requérants estimaient notamment que l’État suisse avait manqué à ses obligations de protéger effectivement la vie (article 2) et de garantir leur droit au respect de la vie privée et familiale et du domicile (article 8). La Cour s’est fondée sur le rapport du Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat (GIEC) du 20 mars 2023 pour apporter une preuve scientifique à l’appui de son raisonnement juridique, ouvrant la voie à un recours plus systématique à un amicus curiae par les juridictions qui seront à l’avenir saisies sur ces thèmes.
- Dans un deuxième arrêt s’inscrivant dans la continuité de « l’affaire Grande-Synthe »[14], la CEDH a jugé irrecevable[15] la requête de l’ancien maire de cette commune. Selon la Cour, le requérant ne justifiait plus, à date, de lien pertinent avec la France ni la commune de Grande-Synthe, le privant de la qualité à agir sur les fondements des articles de la Convention[16].
- Enfin, dans une troisième affaire, la CEDH a examiné la requête déposée par six jeunes portugais visant 32 Etats (les 27 Etats membres de l’Union Européenne ainsi que la Russie, la Turquie, la Suisse, la Norvège et le Royaume-Uni) pour inaction face au réchauffement climatique. S'appuyant sur l'article 8 de la Convention, comme dans les affaires précédentes, ils dénonçaient les atteintes à leurs droits fondamentaux. Toutefois, le 9 avril 2024, la CEDH a jugé irrecevable[17] leur requête aux motifs, d’une part, que les voies de recours internes portugaises n’avaient pas été épuisées, et, d’autre part, que rien dans la Convention ne permettait, par voie d’interprétation judiciaire, d’étendre la juridiction extraterritoriale des États défendeurs de la manière sollicitée[18], en dépit de l’impact transfrontalier des émissions de GES.
Cependant, l’évènement majeur de l’année 2024 à l’échelle européenne reste la publication de la directive dite « CS3D » (Corporate Sustainability Due Diligence Directive)[19] sur le devoir de vigilance européen. Après des débats intenses entre les États membres et les institutions de l’Union européenne[20], la directive a finalement été adoptée le 13 juin 2024. Sous réserve des aménagements susceptibles d’être apportés par le projet de directive Omnibus (cf.infra), elle devait être initialement transposée par les Etats membres avant le 26 juillet 2026, un échelonnement de l’entrée en vigueur en fonction de la taille des entreprises étant prévu[21]. Ce sont près de 700 sociétés françaises qui pourraient être concernées par cette nouvelle directive[22].
Cette directive venait durcir le régime de vigilance pour les Etats membres de l’Union européenne. Avec la CS3D, il ne s’agissait plus seulement d’une obligation de reporting de durabilité comme dans la directive CSRD[23], mais d’une véritable démarche proactive de responsabilisation des sociétés en matière de RSE. Ainsi, le devoir de vigilance s’étendrait désormais à la mise en place de procédures rigoureuses de « diligence raisonnable », destinées à identifier, prévenir et remédier aux incidences négatives sur les droits humains et l’environnement dans leurs propres activités, celles de leurs filiales ainsi qu’au sein de leur chaîne d’activités[24].
La directive contraignait également les entreprises à adopter un plan pour l'atténuation du changement climatique conforme à l’Accord de Paris et à l’objectif de neutralité climatique[25]. Cette obligation impose aux entreprises de déployer leurs meilleurs efforts afin que leur modèle économique et leur stratégie soient compatibles avec la transition vers une économie durable et la limitation du réchauffement climatique à 1,5°C. A noter toutefois que le même texte introduisait une présomption de conformité pour les entreprises publiant un plan de transition conforme à la directive CSRD.
Le principe d’une responsabilité légale directe des entreprises en matière de devoir de vigilance est désormais consacré. A ce titre, un autre apport majeur résidait dans l’obligation faite aux États membres de désigner une autorité de contrôle[26] dotée de pouvoirs de surveillance, d'enquête et de sanction pour assurer une application efficace et coordonnée de la directive. Des sanctions pouvant atteindre 5 % du chiffre d’affaires sont prévues, montant qui apparaît important si l’on se rappelle que l’amende de 10 à 30 millions d’euros initialement envisagée par le législateur français en 2017 avait été censurée par le Conseil constitutionnel[27].
La directive s’inscrivait ainsi dans le contexte d’un foisonnement de réglementations européennes porté par le Green deal[28].
Toutefois, la fin de l’année 2024 a peut-être porté un coup d’arrêt à cette ambition avec l’annonce par la présidente de la Commission européenne, Mme Ursula on der Leyen, d’un projet de directive Omnibus[29] visant à simplifier et harmoniser[30] les trois textes clés de la transition durable européenne (CSRD, Taxonomie[31] et CS3D). Cette initiative a été confirmée par la publication, le 26 février 2025, d’une proposition de ladite directive dont les apports principaux seraient, à ce stade, l’harmonisation des seuils de reporting posés par les textes européens, l’assouplissement des délais de transposition des nouvelles législations européennes (CS3D et nouvelles normes de reporting CSRD), l’élimination des normes sectorielles tout en maintenant le principe de double matérialité, la modulation des obligations de vigilance et la réduction des charges de reporting pesant sur les PME.
Conclusion:
L’année 2024 a indéniablement marqué un tournant dans l’évolution du devoir de vigilance, tant en France qu’au sein de l’Union européenne, et 2025 s’annonce tout aussi décisive. Si l’adoption de la directive CS3D représente une innovation majeure vers un modèle plus contraignant et harmonisé au niveau européen, son avenir reste suspendu à l’adoption de la directive Omnibus. Quant à la jurisprudence européenne, elle demeure fluctuante, comme en témoigne l’arrêt de la cour d’appel de la Haye du 15 novembre 2024[32], qui a annulé une décision antérieure qui obligeait l’entreprise à réduire de 45 % ses émissions de gaz à effet de serre d'ici 2030. Ainsi, entre évolutions réglementaires et incertitudes judiciaires et politiques, l’année 2025 s’annonce déterminante pour l’avenir du devoir de vigilance dans le paysage juridique européen.
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[1] Loi n° 2017-399 du 27 mars 2017 relative au devoir de vigilance des sociétés mères et des entreprises donneuses d'ordre.
[2] Code de commerce, art. L. 225-102-4 et L. 225-102-5
[3] 279 entreprises précisément. Se référer aux données du Radar du devoir de vigilance.
[4] Code de commerce, art. L. 225-102-4, alinéa 2.
[5] Code de commerce, art. L. 225-102-4 et L 225-102-5.
[6] Code de l’organisation judiciaire, art. L. 211-21. Créé par la Loi n° 2021-1729 du 22 décembre 2021 pour la confiance dans l'institution judiciaire, art. 56.
[7] Cette chambre est spécialement compétente pour examiner les litiges relatifs au devoir de vigilance et à la responsabilité écologique. Elle statuera en appel sur les décisions rendues par le tribunal judiciaire concernant le devoir de vigilance et la publication d’informations en matière de durabilité pour les entreprises, conformément à l'article L. 211-21 du Code de l'organisation judiciaire, qui dispose que « Le tribunal judiciaire de Paris connaît des actions relatives au devoir de vigilance fondées sur les articles L. 225-102-4 et L. 225-102-5 du Code de commerce ».
[8 TJ Paris, 5 déc. 2023, n°21/15827.
[9] CA Paris, pôle 5 - ch. 12, 18 juin 2024, n° 23/14348.
CA Paris, pôle 5 - ch. 12, 18 juin 2024, n° 21/22319.
CA Paris, pôle 5 - ch. 12, 18 juin 2024, n° 23/10583.
[10] Assignation du 13 octobre 2020 à l’encontre d’EDF : Accusé d'ignorer les droits des populations autochtones dans un projet éolien au Mexique, EDF n’a pas intégré de mesures spécifiques dans son plan de vigilance 2018. Les demandes de mesures conservatoires et d’un nouveau plan ont été rejetées, mais les plaignants ont fait appel.
Assignation du 29 octobre 2019 à l’encontre de TotalEnergies : Accusé par des collectivités et associations de ne pas respecter ses engagements écologiques, son plan de vigilance 2018 a été jugé non conforme. Les demandes de publication d’un nouveau plan ont été rejetées, mais les parties ont interjeté appel.
Assignation du 7 juin 2021 à l’encontre de Suez (Vigie Groupe) : Mis en cause pour la contamination d’un réseau d’eau au Chili, Suez a contesté sa responsabilité en invoquant un défaut de qualité à défendre, ce que le juge a reconnu. Les associations ont été jugées irrecevables.
[11] CEDH, Duarte Agostinho et autres c. Portugal et 32 autres États, 9 avril 2024, requête n° 39371/20 et CEDH et Carême c. France, 9 avril 2024, requête n° 7189/21.
[12] Code de procédure civile, art. 31 et 32.
[13] CEDH, Verein KlimaSeniorinnen Schweiz et autres c. Suisse, 9 avril 2024 requête n° 53600/20.
[14] CE, 19 nov. 2020, n° 427301. Lire le communiqué de presse.
[15] CEDH, Carême c. France, 9 avril 2024, requête n° 7189/21.
[16] La Cour renvoie aux principes généraux relatifs à la qualité de victime, aux fins de l’article 34, des personnes physiques soulevant sous l’angle des articles 2 et 8 de la Convention des griefs liés au changement climatique.
[17] CEDH, Duarte Agostinho et autres c. Portugal et 32 autres États, 9 avril 2024, requête n° 39371/20.
[18] Cour européenne des droits de l’homme, Communiqué de presse, CEDH, Duarte Agostinho et autres c. Portugal et 32 autres États, 9 avril 2024, requête n° 39371/20, considérant 213.
[19] Directive (UE) 2024/1760 du Parlement européen et du Conseil du 13 juin 2024 sur le devoir de vigilance des entreprises en matière de durabilité et modifiant la directive (UE) 2019/1937 et le Règlement (UE) 2023/2859.
[20] L'idée d'une directive sur le devoir de vigilance prend racine en mars 2021 avec l'adoption d'une résolution par le Parlement européen. La Commission européenne concrétise cette ambition en présentant une proposition de directive le 23 février 2022. Après des négociations intenses, un accord provisoire est trouvé entre le Parlement et le Conseil le 14 décembre 2023. Toutefois, cet équilibre est fragilisé lorsque le Comité des représentants permanents (COREPER II) rejette le texte le 28 février 2024. Plusieurs États membres expriment également leurs réserves sur son champ d'application, les obligations imposées aux entreprises et les risques liés à la responsabilité. Malgré ces tensions, la CS3D finit par être formellement adoptée lors du vote en session plénière du Parlement européen le 24 avril 2024.
[21] Se référer au point 3 « ENTRY INTO FORCE / APPLICATION » de la FAQ de la Commission, qui apporte des précisions en ce sens:
«Un an plus tard, soit à partir du 26 juillet 2027, les règles commenceront à s’appliquer aux entreprises, avec une mise en œuvre progressive sur une période de 3 à 5 ans après l’entrée en vigueur :
- 3 ans (26 juillet 2027) : Application aux entreprises de l'Union européenne comptant plus de 5 000 employés et réalisant un chiffre d’affaires mondial supérieur à 1,5 milliard d’euros, ainsi qu'aux entreprises non européennes générant plus de 1,5 milliard d’euros de chiffre d’affaires dans l’UE.
- 4 ans (26 juillet 2028) : Extension aux entreprises de l'Union européenne comptant plus de 3 000 employés et un chiffre d’affaires mondial supérieur à 900 millions d’euros, ainsi qu'aux entreprises non européennes générant plus de 900 millions d’euros de chiffre d’affaires dans l’UE.
- 5 ans (26 juillet 2029) : Application à toutes les autres entreprises concernées (voir point 4.1 de la FAQ) ».
A noter, que l’une des mesures de la proposition de directive Omnibus (26 février 2025) porterait sur un assouplissement des exigences de transposition de la CS3D.
[22] Initialement, la directive visait surtout les très grandes entreprises (avec plus de 500 employés et un chiffre d'affaires de 150 millions d'euros). Toutefois, la version finalisée touche désormais aussi des entreprises de taille intermédiaire dans des secteurs à haut risque, comme le textile ou les matières premières. Les entreprises opérant dans des secteurs particulièrement exposés aux impacts environnementaux et sociaux (mines, agriculture, textiles, etc.) sont directement concernées, même si elles sont de taille plus modeste. La directive s’applique également aux entreprises étrangères opérant dans l'UE, si elles remplissent les critères de taille ou d’activité dans des secteurs sensibles. A noter néanmoins que la nouvelle directive exclut du périmètre les services financiers fournis dans le cadre des relations entre les entreprises financières et leurs clients.
[23] Directive (UE) 2022/2464 du Parlement européen et du Conseil du 14 décembre 2022, dite « CSRD », modifiant le Règlement (UE) n° 537/2014 et les Directives 2004/109/CE, 2006/43/CE et 2013/34/UE en ce qui concerne la publication d’informations en matière de durabilité par les entreprises.
[24] Etant précisé que cette notion particulièrement débattue couvre les activités des partenaires commerciaux en amont et en aval, par exemple liées à la distribution, au transport et au stockage des produits de l'entreprise, qu’elles s’opèrent ou non au sein de l’UE.
[25] Comme établi dans le Règlement (UE) 2021/1119 (loi européenne sur le climat).
[26] Article 24 de la Directive (UE) 2024/1760 du Parlement européen et du Conseil du 13 juin 2024 sur le devoir de vigilance des entreprises en matière de durabilité.
[27] Décision n° 2017-750 DC du 23 mars 2017.
[28] Également connu sous son nom francisé : « Pacte vert pour l’Europe ».
[29] Pour rappel, une loi omnibus en législation européenne regroupe plusieurs modifications ou révisions de textes existants en une seule proposition, qu'il s'agisse d'une directive ou d'un règlement. Son objectif est de simplifier, harmoniser et adapter le cadre réglementaire tout en réduisant la complexité administrative.
[30] Officiellement, ce projet de directive omnibus ambitionne d’assurer une meilleure cohérence entre ces initiatives législatives tout en réduisant les charges administratives pour les entreprises. Elle fait suite notamment au rapport Draghi, qui préconisait de « simplifier les réglementations sociales et environnementales européennes pour favoriser la compétitivité ».
[31] Règlement (UE) 2020/852 du Parlement européen et du Conseil du 18 juin 2020 sur l’établissement d’un cadre visant à favoriser les investissements durables et modifiant le règlement (UE) 2019/2088.
[32] En 2021, un tribunal néerlandais avait ordonné à Shell de réduire ses émissions de 45 % d'ici 2030. Shell avait interjeté appel de cette décision, menant à l'arrêt de la cour d'appel de La Haye en novembre 2024. Dans cet arrêt, elle reconnaît que la multinationale a une obligation vis-à-vis des citoyens de limiter ses émissions de GES, mais elle estime que ce devoir de vigilance de la société ne permet pas de fixer un objectif chiffré de réduction de ses émissions.